Et nous sommes toxicomanes en 3 D

Ceci est ma conclusion de plusieurs années d’enquête et de militantisme contre les bio énergies.

Derrière son aspect cynique, il se pourrait qu’elle soit simplement réaliste.

Un toxicomane, c’est quelqu’un qui est capable de vendre père et mère pour avoir sa dose. Nous, les humains, sommes en train de brûler mère nature d’une façon irrépressible et en parfaite conscience de nos actes. N’est-ce pas un comportement de toxicomanes de l’énergie et de la consommation ? La forêt devient la nouvelle cible de cet extractivisme forcené, et je dois en vain sortir une litanie d’explications aussi évidentes qu’accablantes pour expliquer ce qu’un enfant comprendrait : en période d’urgence climatique, s’il est une chose à ne pas toucher, c’est bien le couvert arboré ! Quel degré d’addiction faut-il pour refuser d’entendre, voire même de simplement regarder une telle évidence ?

Notre toxicomanie est soutenue par trois piliers incontournables, qui ont infiltré jusqu’à la transition écologique. Ce sont les 3 D : Déni, Déculpabilisation, Dilution des responsabilités.

Le Déni, c’est typiquement le pro-nucléaire qui refuse de voir contre vents et raz de marées qu’une centrale nucléaire comporte des risques, qui minimise le problème des déchets : forcément, ce serait renoncer à la piscine, à la climatisation, au frigo américain qui distribue les glaçons à la seule approche du verre de soda. Enlever la labellisation écologique des produits de la nature et de la forêt, c’est renoncer au chauffage, à la grande maison toute de bois vêtue, à la bagnole propulsée à l’agrocarburant, au sac papier à usage unique. Même un écologiste convaincu a des sueurs froides à l’idée de tels renoncements, et aucun scénario de transition énergétique n’oserait saborder son audience en laissant envisager une option aussi impopulaire. Quand la vérité est trop douloureuse, le déni devient le refuge. Un refuge redoutable parce que non reconnu, c’est la définition même du déni.

La Déculpabilisation, c’est par exemple l’effet secondaire indésirable du recyclage, qui nous incite à consommer de l’emballage à usage unique. Pour la forêt, la déculpabilisation est bien représentée : elle s’appelle bois-déchet, bois provenant de forêts gérées durablement, ou encore plantation d’arbres, et surtout neutralité carbone, cette illusion devenue vérité scientifique à force d’avoir été répétée. La forêt est devenue une machine à déculpabiliser les toxicomanes que nous sommes, alors qu’elle est absolument incapable d’assumer notre dépendance. Ainsi la sylviculture « douce » que les défenseurs de la forêt nous présentent comme l’alternative, pourrait bien être la pire. En plus d’être un garde fou insuffisant devant la vague extractiviste qui déferle sur la forêt, elle nous déculpabilise de l’usage des produits de la forêt et en effet secondaire non désiré elle nous éloigne de la seule issue possible, la réduction des besoins.

La Dilution des responsabilités, on la connaît comme ce qui permet à l’humanité de faire collectivement les pires exactions sans que personne ne soit individuellement responsable. Version forêt, la dilution des responsabilités s’appelle petit poêle, petite chaufferie locale. Elle est mise en exergue par l’attitude devant la méga centrale électrique de Gardanne. Cette centrale est un monstre, d’une façon flagrante et choquante et elle est assez universellement décriée. Pourtant son gigantisme n’est dû qu’au fait qu’elle cumule un tas de petites consommation individuelles. Malgré cela, même ses opposants clament la construction de petites unités, ne remettent pas en cause les petites consommations individuelles et oublient, ou plutôt dénient, que le cumul des ces petites consommations est potentiellement encore plus monstrueux. Et surtout totalement insidieux.